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jeudi 3 juillet 2025

ET SI BRUNO DUMONT AVAIT TOURNE JURASSIC NORD


 Il fait chaud, très chaud et mon cerveau surchauffe, imaginons quelques secondes que le réalisateur Bruno Dumont réalisait un épisode de la Saga Jurassic Park et vienne le présenter à Un Certain Regard à Cannes ! 

Jurassic Nord de Bruno Dumont : Dans un coin battu par le vent, au nord de la France, les sables d'une ancienne carrière de craie ont révélé ce qui semble être une reconstitution biologique involontaire de plusieurs espèces de dinosaures. Aucun parc, aucune foule : juste un silence pesant, des paysans au regard vide, et une enfant muette (jouée par une révélation non-professionnelle du Pas-de-Calais) qui communique par gestes avec un petit Compsognathus. 

L’action quasi inexistante. L’homme de la génétique, ancien chercheur devenu ermite (joué par Jean-Luc Vincent, forcément), élève un T-Rex dans son hangar, entre deux monologues métaphysiques sur la souffrance et la sélection naturelle. 
Une femme gendarme, incarnée par Juliette Binoche, enquête mollement sur la disparition de vaches dans la région. Mais très vite, l’affaire glisse vers une fable mystique sur la résurrection, l’Histoire, et la bêtise contemporaine. 

Pas de musique. Juste le bruit du vent, une mouette lointaine, et un grognement de dinosaure qui se confond avec celui d’un tracteur. 

Les Dialogues, Minimalistes. Des phrases comme : 
– « Y z’sont là, mais ils n'y veulent rien. » 
– « Peut-être qu’c’est nous les fossiles. » 
– « J’ai vu le monstre. Il pleurait. » 

 
Les Dinosaures jamais entièrement visibles. Flous. Filmés de loin, en contre-jour, ou dans des reflets d’eau. Ils sont des figures de l’énigme, pas des attractions. Une séquence centrale voit un stégosaure immobile sous la pluie, observé pendant douze minutes en plan fixe. Certains spectateurs y verront une allégorie de la patience divine, d’autres une preuve de folie. 

Pas de grand final. 
La fillette disparaît. 
Le T-Rex s’enfonce dans la mer. 
Un homme regarde l’horizon, puis dit simplement : 
« Bah. C’est p’têt l’recommencement. » 

Jurassic Nord, ce serait moins un film de dinosaures qu’un poème fossile, une méditation existentielle avec griffes et crocs, une absurde grâce jurassique entre deux betteraves. 
Et franchement, on paierait notre place. 

Sélectionné "Un Certain Regard", mais projeté en séance du matin à 8h30, avec des distributeurs allemands encore ivres de la veille, des critiques qui prennent des notes entre deux bâillements — et pourtant, standing ovation discrète, chuchotée, pour ce cinéma de l'énigme paléontologique. 

Affiche minimaliste : Un œil de dinosaure en gros plan, fixe, comme s’il nous jugeait. 
Titre en lettres blanches sur fond noir : Jurassic Nord 
Et en bas, la mention : 

"Un film où le rugissement devient silence." 

Lors de la conférence de presse, Bruno Dumont déclare calmement : 

« J’ai voulu parler de la bête. Pas celle qu’on craint, mais celle qu’on nie. Le dinosaure, c’est le Christ. Mais fossilisé. » 

Juliette Binoche pose sur les marches avec un sweat à capuche, les chaussures pleines de sable calcaire, souriante mais absente. 

Et le film ? Repart avec le Prix du Jury, à égalité avec un documentaire chilien de 7 heures sur la disparition des glaciers. 

Mais en sortant de la salle Debussy, quelqu’un murmure : 

« Ce n’était pas un film de dinosaures. C’était un film avec leur mémoire. » 

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