Vu le film The Surfer de Lorcan Finnegan (2024) avec Nicolas Cage Julian MacMahon Nicholas Cassim Miranda Tapsell Alexander Bertrand Justin Rosniak Fin Little
(Alors évidement le Rat en nuggets lol Manger le Rat ! Manger le Rat ! Et quelques poissons)
Un père divorcé revient sur la plage d'Australie-Occidentale où il se rendait enfant pour surfer. Il souhaite montrer ses lieux à son fils adolescent et envisage de racheter l'ancienne maison de son grand-père.
Mais les souvenirs et la nostalgie sont gâchés par un groupe de surfeurs dirigé par Scally. Ils leur interdisent l'accès à la fameuse plage et s'amusent à provoquer le père. Bien décidé à ne pas renoncer et à regagner l'estime de son fils, ce dernier va les affronter[
Il y a quelque chose de grésillant, de brûlant, de presque toxique dans The Surfer, comme si l'on posait une bande magnétique au soleil sur un tableau de bord rougi. Ce n’est pas un film "plage", ce n’est pas un film de surf au sens Point Break. C’est un film de sable, de sel, de sang – et de sueur mentale. Lorcan Finnegan, dont on avait déjà repéré l’univers trouble dans Vivarium, orchestre ici une fable crépusculaire et absurde, à mi-chemin entre le western de désert et le film de vengeance psychédélique. Il le fait avec une malice de cinéaste malade, ce genre de types qui filment des mirages en plans fixes.
Nicolas Cage, lui, semble enfin à la bonne température. Cela fait des années qu’il n’est plus dans Hollywood mais autour, gravitant comme un météore punk dans des œuvres où il joue des hommes en dehors de leur axe, cabossés, illuminés, drolatiques. The Surfer est un nouveau clou sur cette croix de comédien iconoclaste. Il y incarne un homme revenu sur la plage de son enfance, en Australie, pour retrouver son fils… et découvre que le "point de surf" où il allait jadis a été privatisé, colonisé par une horde de surfeurs alpha menaçants, qui règnent sur le rivage comme un gang du désert.
À partir de là, le film devient presque biblique : un homme humilié, qui veut regagner son honneur, reconquérir son espace, et finit par devenir une figure quasi-mythologique, hagarde, délirante, grotesque et majestueuse. Cage fait du Cage, mais dans une tonalité plus lente, plus rance, parfois touchante, toujours étrange. Il ne surjoue pas : il s’installe. Il s’incruste comme un rocher, résistant au ressac. Par moments, il semble à deux doigts de se transformer en Clint Eastwood sorti de High Plains Drifter – il y a même des plans très "revenant spectral" sur fond d’océan, le vent dans les cheveux, la caméra qui tremble presque d’émotion kitsch.
Le western n’est jamais loin. C’est un plage-western, un coastal revenge movie : du sable au lieu de la poussière, des planches de surf au lieu des chevaux, mais toujours les mêmes enjeux de territoire, d’honneur, de solitude. On pense à Mad Max, à Wake in Fright, à Délivrance, à Rolling Thunder, et parfois même à The Beach de Danny Boyle… sauf qu’ici, la plage n’a rien de paradisiaque. Elle est sèche, violente, cruelle. Il n’y a pas de communauté hédoniste mais une meute de chacals qui se prennent pour des dieux.
Lorcan Finnegan filme ça avec une sécheresse volontaire, entre zooms seventies, gros plans sur des tronches burinées par l’iode, et photographie solaire presque brûlante, comme si tout avait été trempé dans du citron et de l’essence. La musique de François Tétaz est un atout énorme : elle donne une ampleur religieuse à cette fable absurde. Des nappes synthétiques qui montent, montent… pendant que Cage hurle sa solitude, son désespoir, son entêtement. Une scène où il est contraint de manger un rat vivant devient d’ailleurs un moment d’anthologie grotesque : Manger le rat ! Manger le rat ! hurlent les surfeurs sadiques, pendant que Cage, la bouche en sang, devient une créature primitive, presque préhistorique. C’est absurde, violent, grotesque, et pourtant… on applaudit.
Le scénario, au fond, tient sur un coquillage. Mais ce n’est pas ce qu’on cherche ici. Ce que propose The Surfer, c’est une expérience de cinéma décalée, rugueuse, parfois gênante, toujours fascinante. C’est une VHS rêche qu’on ressort à 3h du matin entre potes, en criant MANGER LE RAT ! comme un cri de ralliement à la contre-culture. Nicolas Cage y est impérial, parce qu’il n’essaie plus d’être un héros : il est un fragment de mythe, un looser céleste, un surfer désaccordé.
The Surfer est un film de genre australien qui flirte avec l’absurde et le sacré, en suivant un homme qui refuse de se faire effacer par un monde de brutes cools. C’est un trip rugueux, malaisant, parfois hilarant, souvent brillant. Et Nicolas Cage, plus hors-sol que jamais, s’y fait plaisir – et nous avec lui.
À voir avec du sable dans les chaussures, une vieille télé cathodique et des potes qui aiment les films fous.
NOTE : 12.00
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Lorcan Finnegan
- Scénario : Thomas Martin
- Musique : François Tétaz
- Décors : Emma Fletcher
- Direction artistique : Susie Opie
- Costumes : Lien See Leong
- Photographie : Radzek Ladczuk
- Montage : Tony Cranstoun
- Production : Brunella Cocchiglia, Robert Connolly, Leonora Darby, James Grandison, James Harris, Nathan Klingher
- Producteurs délégués : Jatin Desai, Mark Fasano, Lorcan Finnegan, Greg Friedman, Samuel Hall, Joshua Harris, Mark Lane, Apur Parikh, Robert Patterson, Michael Rothstein, Ryan Winterstern et Ford Corbett
- Société de production : Tea Shop Productions, Arenamedia, Lovely Productions et Gramercy Park Media
- Société de distribution : The Jokers / Les Bookmakers (France), Stan (Australie), Roadside Attractions (États-Unis)
- Nicolas Cage : le surfer[]
- Julian McMahon : Scally
- Nicholas Cassim : le clochard
- Miranda Tapsell : la photographe
- Alexander Bertrand : Pitbull
- Justin Rosniak : le policier
- Rahel Romahn : l'agent immobilier
- Finn Little : l'enfant
- Charlotte Maggi : Jenny

Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire