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mardi 1 octobre 2024

13.20 - MON AVIS SUR LE FILM MARIA DE JESSICA PALUD (2024)


 Vu le film Maria de Jessica Palud (2024) avec Anamaria Vartolomei Matt Dillon Céleste Brunnquell  Giuseppe Maggio Yvan Attal Charlotte Jiminez Schaff Léo Jiminez Schaff Jonathan Couzinié Marie Gillain Judith Henry Stanislas Merhar Hugo Becker

En une dizaine de séquences, Maria passe en revue quelques-unes des étapes principales de la vie de Maria Schneider de la fin des années 1960 au début des années 1980.

À quinze ans, elle est chassée de son domicile par sa mère, Marie-Christine Schneider, après qu'elle a pris contact avec son père biologique, Daniel Gélin, qui lui fait découvrir le monde du cinéma. À dix-neuf ans, elle est approchée, en 1969, par Bernardo Bertolucci, qui lui propose le rôle de Jeanne dans son prochain film, Le Dernier Tango à Paris. La jeune femme rencontre alors Marlon Brando, plus âgé qu'elle, et qui est déjà une star. Le tournage est dur et intense. Au départ, les scènes de nu ne semblent pas gêner Maria, jusqu'au moment où Bertolucci et Brando la piègent dans la « scène du beurre » qui va durablement l'affecter. Le film est un succès, notamment par le scandale qu'il déclenche dès sa sortie en 1972. Maria est confrontée à la célébrité et au scandale suscités par le film ainsi qu'à l'opprobre de personnes anonymes. Elle commence à n'être sollicitée que pour des films où elle devrait tourner nue, ce qu'elle refuse. Dans cette fin des années 1970, elle tombe dans l'addiction à la drogue (héroïne) et à l'alcool. Elle échoue à tourner avec Buñuel et fait des séjours à l'hôpital. Noor, une jeune étudiante qui la sollicite pour un mémoire universitaire, devient sa compagne mais leur relation est de plus en plus altérée par les addictions de Maria, même si elle suit des traitements de désintoxication. Maria retrouvera une certaine sérénité en même temps qu'une reconnaissance critique lors de sa collaboration avec Rivette en 1981-1982.

Le film Maria de Jessica Palud s’inscrit dans une lignée de films qui abordent la relation complexe entre le cinéma et ses acteurs, mettant en lumière la vulnérabilité des interprètes, en particulier des femmes, dans un milieu encore très marqué par les dynamiques de pouvoir. Ma réticence initiale est compréhensible, surtout face à un sujet aussi délicat, mais Palud parvient effectivement à éviter l'écueil du voyeurisme. Son approche sensible et nuancée permet de montrer cette « situation trash » sous un autre angle, plus intime et moins sensationnaliste.

Le regard féminin de la réalisatrice semble apporter une couche de réflexion bienvenue à l'heure du mouvement #MeToo, où la critique des abus de pouvoir dans le milieu du cinéma est plus que jamais d’actualité. En ce sens, Maria s’impose comme une œuvre qui, tout en évoquant les dérives et les tragédies personnelles, met l’accent sur la résilience et la quête de réappropriation de soi des actrices. Anamaria Vartolomei incarne magnifiquement cette actrice piégée dans son propre rôle, cherchant à se détacher d'une image publique imposée par des hommes comme Bernardo Bertolucci (joué ici par Giuseppe Maggio) et Marlon Brando (campé par l’excellent Matt Dillon). La comparaison entre les personnages masculins et des prédateurs en quête de succès à tout prix est frappante, soulignant une triste réalité du milieu artistique : le corps de l'actrice est souvent instrumentalisé.

Cependant, le choix de casting pour Yvan Attal dans le rôle de Daniel Gélin peut, en effet, susciter des interrogations. Il semble ne pas réussir à apporter la subtilité nécessaire à ce rôle de père, rendant certaines interactions peu crédibles, et cela nuit à l'équilibre du film. Ce bémol est néanmoins compensé par la prestation remarquable de Vartolomei, qui parvient à véhiculer tout le poids émotionnel de son personnage, pris dans un engrenage médiatique et professionnel destructeur.

  Maria est un film intense, parfois dérangeant, mais surtout profondément humain. Il interroge avec justesse la manière dont le cinéma peut, d'un outil d’expression, se transformer en lieu de domination et de manipulation, tout en soulignant la difficulté pour les acteurs et actrices de reprendre le contrôle de leur propre histoire.

J’ai assisté à la préparation d’une scène sous le Pont de Grenelle

NOTE : 13.20

FICHE TECHNIQUE

  • Réalisation : Jessica Palud
  • Scénario : Jessica Palud et Laurette Polmanss, d'après le récit Tu t'appelais Maria Schneider de Vanessa Schneider
  • Musique : Benjamin Biolay
  • Décors : Valérie Valéro
  • Costumes : Alexia Crisp-Jones
  • Photographie : Sébastien Buchmann
  • Son : Jean-Marie Blondel
  • Montage : Thomas Marchand
  • Production : Marielle Duigou
  • Coproduction : Alex Lo, Christie Molia et Kristina Zimmermann
  • Sociétés de production : Les Films de Mina, en coproduction avec Cinema Inutile, Moteur S'il Vous Plaît et Studiocanal
  • Sociétés de distribution : Haut et Court (France) ; Distri7 (Belgique), Frenetic Films (Suisse romande), Immina Films (Québec)

DISTRIBUTION

Anamaria Vartolomei : Maria Schneider
Matt Dillon : Marlon Brando
Céleste Brunnquell : Noor
Giuseppe Maggio : Bernardo Bertolucci
Yvan Attal : Daniel Gélin
Charlotte Jiminez Schaff : Fiona Gélin (8 ans)
Léo Jiminez Schaff : Manuel Gélin (11 ans)
Marie Gillain : Marie-Christine Schneider
Jonathan Couzinié : Michel Schneider
Judith Henry : Judith
Mélissa Barraud : Rose Schneider
Capucine Brunet : Vanessa Schneider
Laetitia Fourcade : Sylvie
Vincent Bramoullé : Vincent
Anne Suarez : Hélène
Jean-Jacques Marnier : Jacques
Patrice Tepasso : Vittorio Storaro
Hugo Becker : Marc, le réalisateur
Laurent Jumeaucourt : André, le producteur
Manuel Severi : le comédien dans la scène de la salle de bain
Stanislas Merhar : Berhmann, l’agent
Camille Archambeaud : la secrétaire de Berhman
Hugues Gemignani : le machiniste (Dernier Tango)
Aurélie Garault : la maquilleuse
Swann Dupont : la scripte
Jérémy Charvet : le pointeur
Annaig Briand : la femme qui insulte Maria dans la brasserie
Alexis Corso : Boris Szulzinger, le réalisateur de Mama Dracula
Jean-Baptiste Le Vaillant : le partenaire vampire
Jean-Marie Mendiant : Luis Buñuel
Yann Denécé : Fernando Rey
Fabienne Rocaboy : la scripte de Buñuel
Christophe Grégoire : le médecin de la clinique psychiatrique
Eugénie Gaudel : l'infirmière de la clinique
Elisa Sommet : l'attachée de presse
Clément Bertani : le journaliste de l'interview du film de Rivette

13.90 - MON AVIS SUR LE FILM LE CLUB DES MIRACLES DE THADDEUS O'SULLIVAN (2024)


Vu le film Le Club des Miracles de Thaddeus O'Sullivan (2024) avec Maggie Smith Kathy Bates Laura Linney Hazel Doupe Stephen Rea Mark McKenna Brenda Fricker Shauna Higgins Lesley Conroy Nial Buggy Martin McDonagh Fionnuala Murphy

Les femmes de la petite ville de Ballyfermot, en Irlande, espèrent toutes être les heureuses élues qui pourront effectuer un pèlerinage dans la ville sacrée de Lourdes, en France. Au cours d'une soirée de tombola pour le moins mouvementée, Lily, Eileen, Dolly et Chrissie remportent le prix tant convoité. Le groupe d'ouvrières émeutières de Dublin partent alors à Lourdes, en France. Au cours de leur périple, elles vont découvrir le sens de l'amitié et connaître chacune un miracle personnel.

 

Le Club des Miracles est effectivement un film touchant et profondément émouvant qui aborde des thèmes universels comme le temps qui passe, les liens familiaux et l'espoir. En suivant Lili et Eileen, deux vieilles demoiselles en quête d’un miracle pour redonner un sens à leurs vies, le film nous entraîne dans une aventure empreinte de tendresse et de nostalgie. Leur visite à Lourdes en France devient le point de départ pour renouer avec Chrissie, un personnage avec qui elles avaient perdu contact. Ce pèlerinage ne concerne pas seulement la foi religieuse, mais aussi celle en la possibilité de réparation des relations humaines et du bonheur retrouvé.

Ce qui fait la force du film, ce sont avant tout les performances magistrales des deux grandes actrices Maggie Smith et Kathy Bates. Maggie Smith, tout juste disparue, laisse ici une prestation poignante, marquée par son inimitable talent pour l’humour sec et l’émotion contenue. Quant à Kathy Bates, qui a récemment annoncé son retrait du cinéma, elle délivre une performance pleine de sensibilité, apportant une chaleur et une humanité touchante à son personnage.

Leur alchimie à l’écran est palpable, et c’est sans doute ce duo d’actrices qui fait du Club des Miracles un moment de cinéma inoubliable. À travers leurs personnages, le film explore des thèmes complexes tels que le vieillissement, la solitude et la réconciliation, tout en insufflant une touche d’optimisme, montrant que l’espoir peut surgir dans les moments les plus inattendus.

Ce film est aussi une ode aux talents de ces deux grandes dames du cinéma, qui nous rappellent ici pourquoi elles ont marqué l’histoire de l’écran. Leur jeu est sobre, authentique, et chargé d’une émotion qui résonne longtemps après la fin du film. Le Club des Miracles devient ainsi une œuvre d'adieu pour ces deux figures emblématiques, offrant un moment de grâce et de beauté, à l’image de leurs carrières. Un film à voir pour son humanité et pour célébrer ces deux immenses actrices.

NOTE : 13.90

FICHE TECHNIQUE


DISTRIBUTION