Vu le film Fantômas de Paul Fejos (1932) avec Thomy Bourdelle Tania Fédor Georges Rigaud Marie-Laure Jean Galland (Fantômas) Maurice Schultz Georges Mauloy Jean Worms Anieka Elter Gaston Modot
Dans son château, la marquise de Langrune est morte
étranglée par Fantômas, désireux de dérober un portefeuille garni d'un million
de francs. L'inspecteur Juve tente de démasquer le mystérieux tueur.
Le Fantômas de 1932, réalisé par Paul Féjos,
se distingue nettement des adaptations plus légères de Hunnebelle des
années 1960. Là où Hunnebelle privilégie le ton burlesque et l'aventure
rocambolesque, Féjos plonge son Fantômas dans une atmosphère nettement
plus sombre, presque oppressante, rappelant l'ambiance des premiers feuilletons
des années 1910 et 1930.
Le film adopte une approche quasi-huis clos, avec une
tension palpable qui se construit dans des espaces confinés. Cette mise en
scène, beaucoup plus intime, donne au film une sensation de partie d'échecs
morbide, comme une version sinistre de Cluedo. L'intrigue se tisse
autour de mystères à huis clos et de dialogues lourds de sous-entendus, créant
une ambiance plus psychologique et angoissante.
L'inspecteur Jouve, incarné par Thomy Bourdelle,
est loin du personnage facétieux et maladroit que Hunnebelle a popularisé à
travers le commissaire Juve joué par Louis de Funès. Ici, Jouve est plus
taciturne, sérieux, presque mélancolique, et semble constamment sur le fil du
rasoir, ce qui reflète le ton du film dans son ensemble. Ce choix de
caractérisation le rend certes moins amusant, mais plus ancré dans la gravité
de la traque d’un criminel insaisissable.
Quant à Fantômas, il perd son aspect
d’antihéros charismatique et "sexy" au profit d'une figure
véritablement menaçante. Il est un fantôme omniprésent, insaisissable, et
terrifiant, fidèle à l’imagerie du criminel d'élite qui ne laisse aucune trace.
Ce Fantômas est froid, calculateur, presque dépourvu d'humanité, ce qui
renforce le climat de terreur qui plane sur l'ensemble du film.
Le film se rapproche du troisième opus de Hunnebelle,
Fantômas contre Scotland Yard, dans l'idée d'un affrontement plus direct
et moins joyeux entre le criminel et les forces de l'ordre. Mais en vérité, le Fantômas
de 1932 est beaucoup plus ancré dans l'esprit des romans feuilletonesques de Marcel
Allain et Pierre Souvestre, où le personnage principal symbolise un
mal omniprésent, à la fois séducteur et cruel.
Ce Fantômas est donc moins spectaculaire mais
plus fidèle à la noirceur originelle du personnage. L’absence d’humour,
l’atmosphère lourde et les intrigues complexes font de cette version une œuvre
méconnue mais fascinante pour les amateurs de suspense psychologique et
d'intrigues criminelles oppressantes.
NOTE : 12.50
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Paul Fejos
- Assistants réalisateurs : Yves Allégret, Claude Heymann et Pierre Schwab
- Scénario : Paul Fejos et Anne Mauclair, d'après le premier épisode du cycle Fantômas de Pierre Souvestre et Marcel Allain
- Dialogues : Anne Mauclair
- Production : Charles David
- Société de production : Société des établissements Braunberger-Richebé
- Directeur de production : Charles David
- Directeurs de la photographie : Roger Hubert et J. Peverell Marley
- Décors : Gabriel Scognamillo
- Son : Marcel Courmes et W. Bell
- Montage : Denise Batcheff
- Musique : Richard Wagner (ouverture de l'opéra Le Vaisseau fantôme)
- Tournage : Automne-hiver 1931-1932
- Thomy Bourdelle : l'inspecteur Juve
- Jean Galland : Fantômas / Étienne Rambert
- Tania Fédor : Lady Beltham
- Jean Worms : Lord Beltham
- Georges Rigaud : Charles Rambert
- Gaston Modot : Firmin, le valet de la marquise
- Roger Karl : Bonnet, le président de tribunal
- Maurice Schutz : l'abbé Sicot
- Philippe Richard : Michel, l'adjoint de Juve
- Georges Mauloy : le professeur Gabriel
- Paul Azaïs : le mécano
- Anielka Elter : la princesse Sonia Davidoff
- Marie-Laure : la marquise de Langrune
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