Vu le film Le Fil de Daniel Auteuil (2024) avec Daniel Auteuil Grégory Gadebois Sidse Babett Knudsen Alice Belaidi Gaetan Roussel Isabelle Candelier Suliane Brahim Aurore Auteuil Jean Noel Brouté Charlie Nelson
Jean Monier (Daniel
Auteuil)
, avocat pénaliste a renoncé à défendre des
criminels, depuis qu'il a obtenu l'acquittement d'un assassin récidiviste.
Un père de
famille paisible et affectueux, Nicolas Milik (Grégory
Gadebois), est placé en détention, accusé
du meurtre de sa femme, alcoolique. L'affaire émeut maître Monier, convaincu de
l'innocence de l'accusé. Roger Marton (Gaëtan Roussel),
patron d'un bar et meilleur ami de Nicolas, également mis en cause dans
l'affaire, meurt en prison.
Monier s'engage
avec humanité dans la défense de l'accusé, contre l'avocat général,
intraitable, qui cherche à établir la preuve de la culpabilité de Milik.
Durant le
procès, le fil de la vérité se dévide, entre innocence et culpabilité,
explorant la construction de l'intime conviction.
Daniel Auteuil,
en adaptant Le Livre de Maître Mô de l'avocat Jean-Yves Moyart, ambitionnait
visiblement de s'inscrire dans la lignée des grands drames judiciaires récents
comme Anatomie d'une chute ou La Nuit du 12. Cependant, malgré de bonnes
intentions, Le Fil échoue à captiver autant qu'il aurait pu. Ce qui aurait pu
être une réflexion poignante sur la justice et les méandres de l'âme humaine se
perd dans une mise en scène convenue et une narration qui manque cruellement de
souffle.
Auteuil, en
tant qu'acteur, offre une prestation solide, fidèle à sa réputation. Il incarne
son personnage avec sobriété et nuance, mais son rôle de réalisateur laisse à
désirer. Le film souffre d’une mise en scène mécanique, presque scolaire, qui
reproduit les codes du genre sans parvenir à les transcender. En cherchant à
imiter le réalisme oppressant des films qu'il prend comme modèles, Auteuil
semble oublier d’insuffler à son œuvre une véritable identité.
L’intrigue,
pourtant tirée d’une histoire vraie et chargée en potentiel dramatique, est mal
exploitée. La progression vers la révélation finale, censée être une montée en
tension, paraît artificielle et prévisible. La vérité horrifique, dévoilée
tardivement, n'a pas l'impact émotionnel escompté. Pire encore, elle semble
instrumentalisée pour choquer plutôt que pour interroger réellement les enjeux
humains et sociaux qui entourent le crime et le procès.
Un des
principaux défauts du film réside dans son incapacité à approfondir les thèmes
qu’il prétend aborder. Rien n’est véritablement dit sur la justice, la police,
ou les raisons complexes du meurtre central. On ne sent pas de réflexion sur le
système judiciaire ou sur les dilemmes moraux des protagonistes. Le spectateur
reste à distance, témoin d'une affaire dont on lui donne les grandes lignes
mais sans jamais explorer ce qui se cache derrière. Deux ans après la
condamnation de Nicolas Milik, une affaire qui a marqué, Le Fil semble évacuer
les vrais enjeux pour se contenter d’un traitement superficiel.
Grégory
Gadebois, acteur talentueux par ailleurs, livre ici une prestation outrée. Son
personnage, visiblement conçu pour incarner l’antipathie, devient presque
caricatural, au point d’enlever toute subtilité à son rôle. Cette surenchère,
combinée à une direction d’acteurs qui manque de finesse, empêche toute
véritable empathie ou compréhension envers les personnages.
Malgré quelques
moments d’intensité et une photographie soignée, Le Fil reste un film plat et
sans âme. Auteuil semble avoir oublié de donner à son œuvre ce supplément
d’authenticité et de tension émotionnelle qui fait les grands films
judiciaires. Là où ses inspirations offrent une véritable plongée dans les
tourments de leurs personnages et une réflexion sur la complexité de la
justice, Le Fil s’apparente davantage à un exercice de style maladroit.
Le Fil déçoit par son manque de profondeur et son incapacité à traiter un sujet pourtant riche avec la rigueur et la passion qu’il méritait. Si Auteuil demeure un grand acteur, sa double casquette ici le dessert, le réalisateur n’étant pas à la hauteur de l’interprète.
NOTE : 9.20
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Daniel Auteuil
- Scénario : Daniel Auteuil et Steven Mitz, d'après un des récits de l'ouvrage Le Livre de maître Mô de Jean-Yves Moyart
- Musique : Gaspar Claus
- Décors : Christian Marti
- Costumes : Charlotte Betaillole
- Photographie : Jean-François Hensgens
- Son : Nicolas Provost
- Montage : Valérie Deseine
- Production : Nelly Auteuil et Hugo Gélin
- Coproduction : Daniel Auteuil
- Sociétés de production : Zazi Films, en coproduction avec France 2 Cinéma, Zack Films et Zinc Film, en association avec les SOFICA Cinémage 18 et Indéfilms 12
- Sociétés de distribution : Zinc Film (France) ; Athena Films (Belgique) et Praesens Film (Suisse romande)
- Budget : 6,4 millions
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