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jeudi 14 novembre 2024

12.80 - MON AVIS SUR LE FILM LE DOULOS DE JEAN PIERRE MELVILLE (1963)


 Vu le film Le Doulos de Jean Pierre Melville (1963) avec Jean Paul Belmondo Serge Reggiani Jean Desailly Michel Piccoli Fabienne Dali René Lefèvre Carl Studer Christian Lude Marcel Cuvelier Jacques de Léon

Faugel est un homme brisé. Pour se venger de l'assassinat de sa femme, il abat Gilbert Varnove, un receleur de bijoux qui l'héberge depuis sa sortie de prison. Puis il prépare avec son ami Rémy un cambriolage dans une villa de Neuilly et fait appel à Silien pour le matériel nécessaire au perçage du coffre-fort. Mais ce dernier passe pour un indicateur : on l'appelle le doulos (le mouchard). La police survient pendant le casse.

Le Doulos (1962), réalisé par Jean-Pierre Melville, est un chef-d'œuvre du cinéma noir français qui reflète l'amour du réalisateur pour les polars américains, tout en créant un univers profondément personnel et singulier. Adapté du roman de Pierre Lesou, ce film réunit tous les éléments emblématiques de Melville : une atmosphère sombre, des personnages ambigus, une esthétique léchée, et une narration maîtrisée, où mensonge et trahison s’entremêlent pour tisser une toile de tension quasi insupportable.

Le film suit deux personnages clés : Maurice Faugel, un cambrioleur récemment sorti de prison, interprété par Serge Reggiani, et Silien, son mystérieux ami, incarné par un Jean-Paul Belmondo énigmatique. Faugel, d’abord épris de vengeance, oscille entre sa loyauté envers ses complices et ses propres objectifs personnels, tandis que Silien se révèle insaisissable, naviguant entre les rôles de complice, indicateur pour la police et manipulateur machiavélique. Cette ambiguïté constante pousse le spectateur à remettre en question chaque parole et chaque acte, créant une tension psychologique rare dans le cinéma de l’époque.

Melville puise dans les codes du film noir américain : l’ombre, les chapeaux feutrés, les manteaux sombres, et cette image froide et grise d’un Paris nocturne magnifiquement photographié. La photographie en noir et blanc, signée Nicolas Hayer, est exceptionnelle : chaque plan est sculpté par la lumière et les ombres, offrant des contrastes intenses qui évoquent une ville à la fois familière et étrangère, un lieu de mystère où les trahisons se cachent à chaque coin de rue. Les jeux d’ombre rappellent le cinéma d'Orson Welles et Fritz Lang, tout en ayant une identité propre à Melville.

Au-delà de son esthétisme, le film brille par sa réflexion sur les dilemmes moraux et la complexité de l’amitié. Le Doulos signifie « indicateur » en argot, mais le mot devient ici le symbole d’une tension éternelle : dans un monde de trahison, qui peut-on vraiment croire ? La question obsède Maurice, qui découvre progressivement qu'il ne peut se fier à personne. Le choix entre "mourir ou mentir" devient ainsi plus qu'un slogan : c'est le dilemme central d'une existence marquée par la trahison, où chaque personnage doit se battre pour sa survie, quitte à sacrifier toute moralité.

Belmondo, alors au sommet de sa popularité, incarne Silien avec un détachement glacial, dégageant une force et une complexité qui le rendent aussi charismatique qu'inquiétant. Faugel, quant à lui, est plongé dans un abîme de méfiance, incapable de démêler le vrai du faux, hésitant à chaque pas. Leur relation, entre rivalité et loyauté trahie, constitue le cœur battant du film et porte la tragédie d’un monde où les alliances se brisent au moindre prétexte.

Avec Le Doulos, Melville offre une œuvre où les mots et les regards prennent autant de poids que les coups de feu, et où chaque choix entraîne des conséquences tragiques. Le film est une démonstration de l'art de Melville, qui manie le suspense avec une précision d'orfèvre, nous offrant un moment de cinéma inoubliable et intense, où la question de la loyauté se pose sans cesse et où chaque personnage doit, en fin de compte, choisir entre mentir ou mourir.

ll faut choisir, mourir ou mentir.

NOTE : 12.80

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