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jeudi 18 décembre 2025

14.00 - MON AVIS SUR LE FILM LE VENT SE LEVE DE HAYAO MIYASAKI (2013)


 Vu le Film Le Vent se Lève de Hayao Miyasaki (2013) des Studios Ghibli 

Une nuit, un jeune garçon, Jirō Horikoshi, rêve qu'il pilote un prototype d'avion aux ailes d'oiseau ; son rêve se termine en cauchemar lorsqu'il est attaqué par un énorme bombardierJirō s'éveille et entame une journée ordinaire dans le Japon de 1918, où il grandit en compagnie de sa famille. Jirō est un jeune garçon travailleur, épris de justice et surtout passionné d'aéronautique. Il collectionne avidement les revues d'aéronautique étrangères qu'il lit en anglais, langue qu'il est en train d'apprendre.   

Le Vent se lève n’est pas un film d’animation comme les autres, et surtout pas un Miyazaki “aimable”. Ici, pas de forêt magique pour sauver le monde, pas d’esprit rieur pour consoler l’enfance. Miyazaki nous emmène dans le ciel, oui, mais un ciel chargé, pesant, historique. Ses créatures fétiches ne sont plus des oiseaux fantastiques mais ses obsessions les plus constantes : les avions. Des machines magnifiques, dangereuses, sensuelles presque, dessinées avec un amour coupable. Des montgolfières aux prototypes militaires, le rêve mécanique remplace le rêve enfantin. 

À travers Jirō Horikoshi, ingénieur aéronautique fasciné par l’Italie et Caproni, Miyazaki raconte l’histoire vraie de l’homme qui concevra le chasseur Zéro, fierté technologique japonaise et arme de destruction massive. Et c’est là toute l’ambiguïté magnifique du film : rêver de beauté dans un monde qui s’apprête à s’autodétruire. Jirō n’est ni un héros ni un monstre, mais un homme qui croit que la perfection technique peut exister indépendamment de l’usage qu’on en fera. Illusion tragique, mais profondément humaine. 

Le film est moins sociable, moins romantique au sens habituel, mais il est traversé par un amour immense : celui de Naoko. Leur relation, marquée par la maladie (la tuberculose), est filmée avec une pudeur bouleversante. Fuir ou accompagner, créer ou aimer, travailler ou rester : Miyazaki pose ses dilemmes sans juger. Le rapport à la maladie devient un miroir de son propre rapport au temps, à la vieillesse, à la fin. 

La mise en scène est d’une fluidité exceptionnelle. Le vent dans les cheveux de Jirō, les paysages qui respirent, les catastrophes (le tremblement de terre de 1923) mises en scène comme des cauchemars éveillés. Les décors sont souvent plus expressifs que les personnages eux-mêmes, presque trop sages graphiquement, comme si Miyazaki voulait que le monde parle à leur place. Et il a raison. 

Scénaristiquement, le film entremêle rêve et réalité avec une élégance folle. Les conversations avec Caproni sont des dialogues avec la conscience de Miyazaki lui-même. « Le vent se lève, il faut tenter de vivre » : citation de Valéry, programme de vie et épitaphe artistique. 

C’est sans doute le film le plus personnel, le plus autobiographique de Miyazaki. Son rapport à l’aviation (son père travaillait dans l’aéronautique), à la guerre, à la culpabilité du créateur. Un film beau et triste, mélancolique sans être résigné. Un film d’adieu… qui heureusement n’en fut pas un. 

Ce n’est peut-être pas son film le plus aimable, mais c’est l’un de ses plus grands. Un Miyazaki adulte, conscient, qui regarde ses rêves droit dans les yeux et accepte enfin leur part d’ombre. C’est beau. C’est du Miyazaki. Et le vent, longtemps après le générique, continue de souffler. 

 NOTE : 14.00

FICHE TECHNIQUE

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