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mercredi 15 janvier 2025

6.90 6 MON AVIS SUR LE FILM NIKI DE CELINE SALETTE (2024)

 


Vu le film Niki de Céline Salette (2024) avec Charlotte LeBon John Robinson Damien Bonnard Judith Chemla Alain Fromager Virgile Bramly Nora Arzeneder John Fou Quentin Dolmaire Eric Pucheu


Paris 1952, Niki s'est installée en France avec son mari et sa fille loin d'une Amérique et d'une famille étouffantes. Mais malgré la distance, Niki se voit régulièrement ébranlée par des réminiscences de son enfance qui envahissent ses pensées. Depuis l'enfer qu'elle va découvrir, Niki trouvera dans l'art une arme pour se libérer.

Premier long-métrage de Céline Salette en tant que réalisatrice, Niki était un projet intrigant, d’autant plus que Salette est une actrice que l’on sait talentueuse et investie. Pourtant, malgré les attentes élevées, le film peine à convaincre, en grande partie à cause d’une approche déséquilibrée de son sujet : l’artiste iconique Niki de Saint Phalle. À vouloir mêler biographie personnelle et réflexion sur le trauma, Salette finit par négliger ce qui aurait dû être le cœur du récit : l’œuvre de Niki de Saint Phalle et sa place majeure dans le monde de l’art contemporain.

Le choix de centrer l’histoire sur les traumatismes de la vie privée de l’artiste – en particulier le viol par son père – est compréhensible, car ce drame a effectivement marqué une grande partie de sa création artistique. Mais là où d’autres œuvres auraient su entremêler avec subtilité l’intime et l’artistique, Niki semble se perdre en chemin. La mise en scène insiste sur le poids du passé, mais sans jamais vraiment réussir à montrer comment cette douleur a nourri l’imaginaire débridé de l’artiste.

Les célèbres sculptures féminines monumentales, les tirs de peinture ou encore les Nanas bariolées, emblématiques de la créativité explosive de Niki de Saint Phalle, ne sont qu’effleurés. Résultat : le film paraît déséquilibré, comme s’il s’agissait davantage d’un manifeste personnel sur les violences faites aux femmes que d’un portrait fidèle de l’artiste.

Un autre choix étrange du film réside dans l’utilisation d’un langage québécois pour incarner une femme franco-américaine. Ce décalage linguistique surprend et peut même agacer, car il n’a pas de véritable justification narrative. Si l’on comprend l’intention de Salette de donner une voix singulière à son héroïne, ce choix de ton crée une distance avec le spectateur. Niki de Saint Phalle, bien qu’évoluant entre la France et les États-Unis, ne parlait pas avec cet accent, et cette décision artistique brouille encore davantage la cohérence de l’ensemble.

En termes de mise en scène, le film oscille entre scènes naturalistes et séquences oniriques, probablement pour refléter le caractère fantasque de Niki de Saint Phalle. Si certaines images sont réussies, notamment lorsqu’elles évoquent l’univers foisonnant de l’artiste, elles restent malheureusement anecdotiques. On ne ressent jamais pleinement la force créative de cette femme qui a marqué l’histoire de l’art par sa capacité à transgresser les normes et à proposer un regard neuf sur le féminin.

Pourtant, tout n’est pas à jeter. Salette parvient à susciter une certaine émotion lorsqu’elle évoque les aspects les plus violents de la vie de Niki, notamment son enfance brisée. La scène où elle confronte ce passé douloureux est poignante, et l’actrice principale livre une performance intense. Mais cela ne suffit pas à sauver un film qui donne l’impression d’être resté à mi-chemin entre deux intentions : celle de raconter une histoire personnelle bouleversante et celle de célébrer une artiste hors norme.

Nikiest une tentative courageuse mais inaboutie. Céline Salette avait entre les mains un sujet passionnant, mais son parti pris narratif, trop axé sur le trauma et insuffisamment sur l’œuvre, empêche le film de véritablement captiver. On ressort de la séance avec un sentiment d’inachevé, frustré de ne pas avoir mieux saisi l’essence de l’artiste.

Un film à voir peut-être pour la curiosité, mais qui, malheureusement, ne laisse pas une empreinte durable.

Note / 6.90

FICHE TECHNIQUE

  • Réalisation : Céline Sallette
  • Scénario : Samuel Doux et Céline Sallette
  • Musique : Para One
  • Décors : Rozenn Le Gloahec
  • Costumes : Matthieu Camblor et Marion Moulès
  • Photographie : Victor Seguin
  • Son : Jean-Pierre Duret et Paul Heymans
  • Montage : Clémence Diard
  • Production : Julien Deris et David Gauquié (Cinéfrance Studios)
    • Coproduction : Jalil Lespert (Onzecinq) et Jean-Luc Ormières (Cinéfrance Studios) ; Florence Gastaud (Les Compagnons du Cinéma)
  • Sociétés de production : Cinéfrance Studios et Wild Bunch Distribution, en coproduction avec France 2 Cinéma et Onzecinq (France), Be TV / VOO La Compagnie Cinématographique, Panache Productions et Proximus (Belgique), en association avec 5 SOFICA
  • Sociétés de distribution : Wild Bunch Distribution ; Paradiso Entertainment (Belgique), Praesens Film (Suisse romande)

DISTRIBUTION


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