Vu la série sur (France2 ) Dans l’Ombre de Pierre Schoeller (2024) avec Karin Viard Melvil Poupaud Swann Arlaud Evelyne Brochu Philippe Uchan Sofian Khammes Eric Paradisi Baptiste Carrion-Weiss Maud Wyler Clara Antoons Boris Terral Muriel Combeau Catherine Salée
Adaptée d’un livre de Édouard Philippe et Gilles
Boyer
Paul Francœur vient de remporter les primaires de son
parti. Cette victoire lui permet de se lancer dans la campagne présidentielle.
César Casalonga, son principal conseiller, doit éviter les attaques des autres
candidats tout en gérant les tensions au sein de sa famille politique.
Dans l'Ombre, la série politique signée Pierre
Schoeller et diffusée sur France 2, est une plongée en six épisodes dans les
coulisses d’une élection présidentielle française, où manipulations et
alliances se tissent dans l’ombre. Inspirée par un roman écrit par un homme
politique de droite – un détail non négligeable pour l’ambiance de la série – Dans
l'Ombre vise à montrer la course au pouvoir de l’intérieur, avec ses
stratégies, ses intrigues et la férocité de ses acteurs. Cependant, bien
qu’elle s’appuie sur une mise en scène soignée et d’excellents acteurs, elle
laisse quelque peu le spectateur sur sa faim.
En effet, malgré la qualité de la réalisation de
Schoeller, qui avait brillamment signé L’Exercice de l’Etat, et le
talent indéniable de Swann Arlaud, Karin Viard, et Melvil Poupaud, la série
manque de cette touche de férocité, de « trash », qui rendrait les personnages
et les situations encore plus vraisemblables. Les séquences en coulisses sont
parmi les meilleures du récit, mais l’intrigue reste un peu trop lisse et
aseptisée, presque « bisounours » par moments, ce qui atténue le suspense et
l’intensité de cette course au sommet.
Schoeller parvient à dresser un portrait intrigant des
rouages de la politique française, avec des personnages souvent ambivalents,
tiraillés entre leurs idéaux et leurs ambitions. Cependant, l’intrigue ne va
pas assez loin dans la cruauté et les sacrifices, des éléments que l’on sait
omniprésents dans les campagnes présidentielles réelles. On ressent une retenue
qui, si elle peut séduire certains spectateurs, risque de laisser les amateurs
de récits politiques un peu plus sombres et réalistes sur leur faim. Les
meilleures séries politiques, comme Borgen ou House of Cards,
sont celles qui n’hésitent pas à explorer sans concession l’avidité, la
corruption et la trahison, éléments qui semblent ici plus nuancés qu’ils ne le
seraient sans doute dans la réalité.
Dans l'Ombre accumule des éléments dramatiques qui
finissent par alourdir l’intrigue sans lui permettre de creuser pleinement
chaque arc narratif. Entre un candidat en fauteuil roulant, suite à un accident
tragique, et la mort soudaine du président en exercice, la série semble vouloir
jouer sur les émotions à travers des situations extrêmes. Cependant, ce choix
de mélodrame multiple nuit à la crédibilité et à la cohérence de l’histoire.
Cela disperse l’attention du spectateur et dilue l’impact émotionnel de chaque
événement.
L’arc narratif du candidat handicapé aurait pu, à lui
seul, ouvrir des perspectives fascinantes et rares dans le monde de la
politique télévisée, en explorant, par exemple, les préjugés, les obstacles et
la résilience d'un personnage en quête de pouvoir malgré son handicap. De même,
la disparition du président en exercice offre un contexte riche pour une
analyse des luttes de succession, des jeux d’influence et des rivalités
brutales qui surgissent lors d’une vacance inattendue au sommet de l’État. Malheureusement,
en tentant de cumuler ces deux pistes, la série ne parvient à rendre ni l’une
ni l’autre pleinement convaincante.
Ce choix de narration paraît plus focalisé sur l’effet
dramatique que sur une véritable exploration des enjeux de pouvoir. L’émotion,
au lieu de servir le propos, devient parfois un artifice, ce qui rend plus
difficile l’immersion dans l’univers politique. En fin de compte, ces éléments,
au lieu de renforcer la tension de la série, semblent diluer son potentiel
narratif et l'empêchent d’atteindre la profondeur souhaitée.
Avec seulement six épisodes, Dans l'Ombre peine
également à approfondir les arcs narratifs et les relations complexes entre les
personnages, ce qui limite leur impact. Si les interprétations de Swann Arlaud
et de Melvil Poupaud sont impeccables et confèrent de la crédibilité aux enjeux
politiques du récit, l’écriture semble contrainte par le format, compressée,
sans le souffle nécessaire pour développer toutes les nuances des relations de
pouvoir.
Dans l'Ombre
est une série bien réalisée, avec des acteurs convaincants et une mise en scène
élégante, mais elle manque d’audace et d’authenticité pour véritablement
captiver et immerger le spectateur dans l’âpreté du monde politique. Elle reste
un exercice stylisé et réussi, mais en retrait par rapport aux réalités,
parfois plus sordides et captivantes, de la politique française. Pour une série
inspirée de la « vraie vie », la fiction semble ici moins prenante que la
réalité.
NOTE : 12.10
DISTRIBUTION
- Melvil Poupaud : Paul Francœur
- Karin Viard : Marie-France Trémeau, concurrente de Paul Francœur
- Evelyne Brochu : Marylin, directrice de la communication de Paul Francœur
- Philippe Uchan : le Major
- Sofian Khammes : Texier
- Baptiste Carrion-Weiss : Jérémie Caligny
- Éric Paradisi : Démosthène
- Maud Wyler : Leïla Argument
- Clara Antoons : Iris Francoeur
- Étienne Beydon : Benjamin Pinguet
- Gautier Boxebeld : Mukki
- Boris Terral : sénateur Pinguet
- Muriel Combeau : Olympe
- Catherine Salée : la Walkyrie
- François Raison : Guillaume Vital
- Anne-Sophie Lapix : elle-même (présentatrice du journal de France 2)
- Laurent Delahousse : lui-même (présentateur du journal de France 2)
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