Vu le film Belphégor le Fantôme du Louvre de Jean Paul Salomé (2001) avec Sophie Marceau Frédéric Diefenthal Michel Serrault Julie Christie François Levental Lionel Abelanski Françoise Lépine Jean François Balmer Jacques Martial et Patachou
Des objets antiques retrouvés lors d'une fouille en Egypte arrivent au Louvre pour y être analysés. Alors que les archéologues utilisent un laser pour déterminer l'âge d'un sarcophage, un fantôme est libéré... Bertrand Faussier, le directeur du Louvre, fait appel à Glenda Spencer, une égyptologue de renom, pour examiner les restes provenant de la fouille. Celle-ci affirme que la momie, à l'intérieur du sarcophage, n'est autre que l'esprit malin de Belphégor...
Quand on a grandi dans l’ombre menaçante de Belphégor, la série de Claude Barma diffusée en 1965, quand Juliette Gréco hantait les couloirs du Louvre avec cette grâce vénéneuse et cet envoûtement diffus, on aborde Belphégor – Le fantôme du Louvre avec un mélange d’excitation nostalgique et d’appréhension. Malheureusement, la malédiction qui frappe les adaptations de séries françaises cultes au cinéma n’a pas épargné celle-ci. Ce n’est pas le fantôme du Louvre qui fait trembler ici, mais bien la pauvreté de l’entreprise.
Jean-Paul Salomé, réalisateur bien intentionné mais souvent hasardeux (Arsène Lupin, Les Femmes de l’ombre), s’attaque ici à une icône de la télévision française sans en comprendre ni la texture, ni l’atmosphère. Il transforme ce qui était une œuvre d’ambiance, mystérieuse et raffinée, en un objet clinquant, maladroit, sans direction ni souffle. Là où la série distillait une peur diffuse dans un Paris nocturne et désert, le film ne fait qu’accumuler les effets faciles, les scènes désarticulées et les plans numériques ratés.
L’histoire ? Elle tente de réactualiser le mythe de Belphégor en imaginant qu’une entité maléfique, libérée d’un sarcophage égyptien exposé au Louvre, s’empare du corps de Lisa (Sophie Marceau), jeune femme solitaire qui vit en face du musée. Ce postulat, à défaut d’être original, aurait pu tenir la route si le traitement avait suivi. Mais le scénario, éparpillé entre possession, enquête policière, romance banale et pseudo-relecture ésotérique, s'effondre comme un décor de carton-pâte. Le Louvre, pourtant théâtre idéal pour un film de genre, devient un simple décor de publicité, vidé de tout mystère, suréclairé, survolé.
Sophie Marceau, qu’on sent perdue dans un rôle qui alterne poses gothiques et scènes de torpeur, semble aussi déconnectée que son personnage. Michel Serrault, pourtant acteur immense, cabotine sans conviction, et Frédéric Diefenthal, censé apporter une touche comique ou dynamique, semble échappé d’un autre film, voire d’un mauvais pastiche. Aucun ne parvient à croire vraiment à ce qu’il joue. La direction d’acteurs, flottante, rend les dialogues plats, artificiels, parfois risibles.
Quant aux effets spéciaux, censés dynamiser l’ensemble, ils sont catastrophiques. Le spectre numérique de Belphégor – vaguement humanoïde, à la silhouette floue, avec des déplacements dignes d’un jeu vidéo mal conçu – n’inspire ni crainte, ni fascination. On est très loin de la figure spectrale et glaçante de la série. Loin aussi de la suggestion qui faisait la force de l’original : ici tout est montré, et tout est raté. Les moments de frayeur tournent court, les envolées lyriques sont plombées par un montage bancal et une bande originale sans ampleur.
L’élément égyptologique, au cœur du mythe, est réduit à quelques banalités d’exposition : le sarcophage, les symboles, les dieux anciens, tout cela n’est qu’accessoire, sans profondeur ni résonance. Aucune réelle fascination pour l’ésotérisme, aucun développement mythologique crédible. L’Égypte ancienne devient ici un prétexte folklorique pour enrober une intrigue policière digne d’un téléfilm du dimanche soir.
Le vrai fantôme du film, finalement, c’est le souvenir de la série originelle, qui plane comme un reproche permanent. Jean-Paul Salomé n’a pas compris que Belphégor fonctionnait moins par son récit que par son atmosphère, sa lenteur inquiétante, son mystère permanent. L’audace d’un noir et blanc étouffant, d’un Paris déserté, d’un musée devenu tombeau. En transposant cela dans un cinéma de consommation rapide, sans vision, sans style, il trahit la source sans rien proposer en échange.
Plus globalement, le film illustre l’impossibilité chronique du cinéma français à aborder le fantastique avec sérieux, respect ou audace. Trop souvent, les tentatives tournent à l’hommage mou, au simulacre maladroit, ou au rejet du genre. Ce Belphégor-là n’échappe pas à la règle. Et il ajoute une pierre à l’édifice des adaptations ratées de séries cultes, aux côtés d’autres tentatives aussi infructueuses.
On en ressort avec un goût amer. Non pas à cause d’une mauvaise soirée, mais à cause d’une promesse trahie. Celle d’un retour au mystère, au frisson originel. Celle d’un hommage à un mythe de la télévision française. Mais Belphégor ne renaît pas ici. Elle agonise, digitalisée, déracinée, sacrifiée sur l’autel d’un cinéma qui semble avoir oublié comment faire peur.
Une malédiction, oui. Mais pas celle de l’Égypte ancienne. Celle d’un cinéma français qui, trop souvent, manque l’essentiel : la foi dans ses propres ombres.
NOTE : 7.10
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Jean-Paul Salomé
- 1er assistant réalisateur : Guy Nicolas
- 2e assistant réalisateur : Mathieu Thouvenot
- Scénario : Jean-Paul Salomé, Danièle Thompson (dialogues) et Jérôme Tonnerre d'après le roman d'Arthur Bernède
- Musique : Bruno Coulais
- Régisseur général : Francois Menny
- Régisseur adjoint : Nicolas Fagard
- Costumes : Pierre Bechir
- Photographie : Jean-François Robin
- Son : Laurent Poirier
- Maquillage : Nurith Barkan
- Direction du casting : Stéphane Foenkinos
- Script : Laurence Lemaire
- Montage : Sylvie Landra
- Production : Alain Sarde
- Producteur exécutif : Christine Gozlan
- Sociétés de production : Les Films Alain Sarde, Studiocanal, Natexis Banque Populaire Images, Studio Images 7, TF1 Films Production
- Effets visuels numériques : Studio Duboi (Paris)
- Cascades : Cyril Raffaelli
- Chef machiniste : Bernard Bregier
- Chef décoratrice : Michèle Abbé-Vannier
- Cadreur : Georges Diane
- Musiques additionnelles : Natacha Atlas
- Réalisation : Jean-Paul Salomé
- 1er assistant réalisateur : Guy Nicolas
- 2e assistant réalisateur : Mathieu Thouvenot
- Scénario : Jean-Paul Salomé, Danièle Thompson (dialogues) et Jérôme Tonnerre d'après le roman d'Arthur Bernède
- Musique : Bruno Coulais
- Régisseur général : Francois Menny
- Régisseur adjoint : Nicolas Fagard
- Costumes : Pierre Bechir
- Photographie : Jean-François Robin
- Son : Laurent Poirier
- Maquillage : Nurith Barkan
- Direction du casting : Stéphane Foenkinos
- Script : Laurence Lemaire
- Montage : Sylvie Landra
- Production : Alain Sarde
- Producteur exécutif : Christine Gozlan
- Sociétés de production : Les Films Alain Sarde, Studiocanal, Natexis Banque Populaire Images, Studio Images 7, TF1 Films Production
- Effets visuels numériques : Studio Duboi (Paris)
- Cascades : Cyril Raffaelli
- Chef machiniste : Bernard Bregier
- Chef décoratrice : Michèle Abbé-Vannier
- Cadreur : Georges Diane
- Musiques additionnelles : Natacha Atlas

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