Vu le film La Prisonnière de Bordeaux de Patricia Masuy (2024) avec Isabelle Huppert Hafsia Herzi William Edimo Magne-Håvard Brekke Lionel Dray Noor Elsari Jean Guerre Souye
Deux
femmes, de milieux sociaux opposés, se rencontrent au parloir d'une prison.
Alma (Isabelle Huppert) est une bourgeoise dont le mari neurologue est
incarcéré. Mina (Hafsia Herzi), blanchisseuse, dont le mari est également incarcéré, vit dans une
lointaine banlieue. Leur rencontre va déboucher sur une amitié révélatrice.
On
pouvait attendre beaucoup de La Prisonnière de Bordeaux. Avec un titre
pareil, on espérait un film puissant sur la justice, sur les liens humains
brisés ou préservés à travers les parloirs, et surtout sur la résilience des
femmes face à l’enfermement. D’autant plus que le casting féminin promettait de
belles émotions, avec des actrices que l’on aime suivre pour leur intensité et
leur capacité à donner vie à des personnages complexes. Hélas, le résultat
final déçoit profondément : le film se perd dans une avalanche d’intentions
maladroitement amenées, au point de noyer son propos initial dans un discours
politique lourd et mal digéré.
Dès les
premières minutes, on sent que le scénariste cherche à en dire beaucoup, trop
même. Le thème de la justice, qui aurait pu être au cœur de l’intrigue, devient
rapidement un prétexte à une succession de dialogues verbeux, où la portée
politique prend le pas sur l’émotion et la dramaturgie. Ce n’est pas que les
idées défendues soient inintéressantes, mais elles manquent de finesse dans
leur traitement, et finissent par lasser plutôt que de captiver. La métaphore
des parloirs, qui aurait pu offrir un cadre propice à des échanges humains
d’une grande richesse, se retrouve ainsi diluée dans un discours qui cherche à
tout prix à « faire passer un message ».
Sur le
plan du rythme, le film souffre d’une lenteur excessive. Les scènes s’étirent
sans qu’il se passe grand-chose, et l’ennui gagne vite le spectateur. Le
scénario manque cruellement de tension dramatique : ni les enjeux des
personnages, ni leur évolution ne parviennent à susciter un réel intérêt. On
observe, on attend que quelque chose se passe, mais rien ne vient réellement
bousculer cet univers morne et sans relief.
Le plus
frustrant, c’est de voir des actrices talentueuses réduites à des rôles figés,
presque mécaniques, où elles ne peuvent jamais pleinement déployer leur
potentiel. On sent qu’elles font de leur mieux avec ce qu’on leur donne, mais
sans une direction claire et sans un scénario à la hauteur, leur jeu semble en
vain.
La Prisonnière de Bordeaux est une œuvre qui passe à côté
de son sujet. On espérait un film poignant et humaniste, on se retrouve avec
une tentative maladroite de pamphlet politique, trop lourde pour émouvoir et
trop terne pour divertir. Si quelques moments de grâce subsistent grâce au
talent des actrices, ils ne suffisent pas à sauver ce long-métrage qui s’enlise
dans ses propres ambitions mal maîtrisées. Une vraie occasion manquée.
NOTE : 7.30
FICHE TECHNIQUE
- Réalisation : Patricia Mazuy
- Scénario : François Bégaudeau, Pierre Courrège et Patricia Mazuy (avec la collaboration d'Émilie Deleuze)
- Photographie : Simon Beaufils
- Costumes : Caroline Spieth
- Décors : Dorian Maloine
- Son : François Boudet, Jean Mallet et Nathalie Vidal
- Montage : Mathilde Muyard
- Musique : Amine Bouhafa
- Production : Rectangle Productions - Picseyes - Arte France Cinéma
- Distribution : Les Films du losange
- Isabelle Huppert : Alma
- Hafsia Herzi : Mina
- William Edimo : Yacine
- Magne-Håvard Brekke : Christopher
- Lionel Dray : Nasser
- Noor Elsari : Noor
- Jean Guerre Souye : Julien
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