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lundi 14 octobre 2024

16.90 - MILLE FILMS DE MA VIE - LA NUIT DU CHASSEUR DE CHARLES LAUGHTON (1955)


 Dans le cadre des Mille Films de ma Vie , je vous propose le film  La Nuit du Chasseur de Charles Laughton (1955) avec Robert Mitchum Shelley Winters Lillian Gish Billy Chapin Sally Jane Bruce Gloria Castillo Peter Graves Evelyn Varden James Gleason Don Beddoe Roy Engel

Un prêcheur inquiétant poursuit dans l'Amérique rurale deux enfants dont le père vient d'être condamné pour vol et meurtre. Avant son incarcération, le père leur avait confié dix mille dollars, dont ils ne doivent révéler l'existence à personne. Pourchassés sans pitié par ce pasteur psychopathe et abandonnés à eux-mêmes, les enfants se lancent sur les routes.

"La Nuit du Chasseur" (1955), unique film réalisé par Charles Laughton, est un chef-d’œuvre inclassable qui allie la noirceur du film noir à la puissance allégorique du conte. Pourtant, lors de sa sortie, il fut un échec commercial et critique aux États-Unis, ce qui dissuada Laughton de réitérer l’expérience derrière la caméra. Ce n’est que des années plus tard que le film a été réhabilité par les critiques et cinéphiles, devenant une référence absolue du cinéma mondial.

Le film met en scène Robert Mitchum dans l'un de ses rôles les plus mémorables, celui du révérend Harry Powell, un prédicateur meurtrier qui parcourt les États-Unis pour épouser des veuves, les tuer et s’approprier leur argent. Sa cible principale est une veuve jouée par Shelley Winters, mais sa quête de richesse prend une tournure encore plus sombre lorsqu'il se met à traquer ses enfants, persuadé qu’ils détiennent l’argent caché de leur père décédé. Mitchum, avec ses tatouages "LOVE" et "HATE" sur les phalanges, incarne la dualité du bien et du mal, tout en véhiculant une menace palpable tout au long du film. Son personnage froid et manipulateur reste l'une des incarnations les plus effrayantes du mal au cinéma.

Laughton utilise le noir et blanc de manière magistrale, transformant l’histoire en un cauchemar visuel. Le film est imprégné d’un style expressionniste, avec des contrastes marqués entre l’ombre et la lumière, rappelant les films muets allemands et l’esthétique gothique. Les scènes nocturnes, notamment celles où Powell traque les enfants, sont d'une intensité presque insoutenable, créant une atmosphère d’angoisse constante.

Les enfants, joués par Billy Chapin et Sally Jane Bruce, apportent une fragilité qui contraste avec la cruauté de Powell. Leur fuite à travers une Amérique rurale et fantasmagorique symbolise une quête de survie dans un monde où les adultes, censés être protecteurs, se révèlent être des prédateurs. Leur rencontre avec Rachel Cooper, une figure maternelle interprétée par Lillian Gish, grande star du cinéma muet, apporte une note d’espoir et de protection face à la menace omniprésente de Powell. Gish, incarnation du bien, représente l'opposé direct de Mitchum, le mal absolu, dans une confrontation finale aux accents bibliques.

Le film critique subtilement l'hypocrisie religieuse à travers le personnage de Powell, un faux prophète qui utilise la religion pour justifier ses actions violentes et cupides. Laughton ne fait pas une attaque frontale contre la religion, mais montre comment elle peut être manipulée par des figures charismatiques pour servir leurs propres intérêts destructeurs.

La tension du film est portée par une précision presque machiavélique dans la mise en scène, chaque plan étant méticuleusement composé pour renforcer l’atmosphère oppressante. La musique, signée Walter Schumann, contribue également à créer un climat de terreur croissante.

Dans "La Nuit du Chasseur", les deux enfants, John et Pearl, incarnent l’innocence et la vulnérabilité, traqués sans relâche par Harry Powell, un prédateur implacable. La dynamique entre les enfants et Powell peut effectivement être comparée à une métaphore animalière, comme celle du lapin chassé par un rapace. Powell, tel un oiseau de proie, plane sans cesse autour d'eux, son regard perçant les guettant dans chaque recoin, prêt à fondre sur eux dès qu'il en a l’occasion.

Cette vision symbolique se retrouve particulièrement dans la manière dont Laughton construit la tension visuelle. Les enfants, petits et fragiles, fuient à travers une nature vaste et sombre, une Amérique rurale peuplée de dangers. L’une des scènes les plus marquantes est celle où Powell, chantant son sinistre refrain religieux, les poursuit en bateau sur une rivière calme, tandis qu’ils tentent désespérément de lui échapper. La rivière devient alors un espace à la fois de menace et de répit, un contraste entre la traque implacable du prédateur et la fuite effrayée de ses proies.

La métaphore du lapin et du rapace accentue la lutte inégale entre les enfants et Powell. Ils sont faibles et sans défense, alors que Powell est omniprésent, rusé et dangereux. Cependant, tout comme dans la nature, l’espoir réside dans la possibilité de survie à travers la ruse, la persévérance et, dans le cas du film, l’intervention providentielle de Rachel Cooper, la figure protectrice qui veille sur les enfants comme un refuge contre le prédateur.

Cette dynamique de proie et de prédateur, où le danger est constant et oppressant, renforce le suspense du film, faisant de "La Nuit du Chasseur" une fable terrifiante sur l’innocence pourchassée par le mal.

NOTE : 16.90

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