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dimanche 23 août 2015

MASAAN DE NEERAJ GHAYNAN PAR CRITIQUE CHONCHON

Masaan
Bénarès, la cité sainte au bord du Gange, punit cruellement ceux qui jouent avec les traditions morales.
Deepak (Vicky Kaushal, d'une beauté sidérante), un jeune homme issu des quartiers pauvres, vivant avec son père et son frère aîné, brillant étudiant admis à Polytechnique, tombe éperdument amoureux d'une jeune fille qui n’est pas de la même caste que lui.
Devi (Richa Chadda), une étudiante à la dérive, vit torturée par un sentiment de culpabilité suite à la disparition de son premier amant tué par la police avec une extrême violence parce qu'ils avaient couché ensemble avant le mariage (cette scène est particulièrement violente, effroyable).
Pathak (Sanjay Mishra, éblouissant), père de Devi, victime de la corruption policière, perd son sens moral pour de l’argent afin que sa fille retrouve son honneur.
Jhonta (Nikhil Sahni), un jeune garçon, cherche une famille.
Des personnages en quête d'un avenir meilleur, écartelés entre le tourbillon de la modernité et la fidélité aux traditions, dont les parcours vont bientôt se croiser...
Je n'avais pas eu le temps, lorsqu'il est sorti en juin, d'écrire tout le bien que je pense de "Masaan", film franco-indien du jeune réalisateur Neeraj Ghaynan qui signe ici son premier long métrage après avoir été le réalisateur de la seconde équipe sur "Ugly" de son compatriote Anurag Kashyap. "Maman" était sélectionné à Cannes, dans la section "Un certain regard" où il reçu le Prix Spécial du Jury et le Prix Fipresci.
Neeraj Ghaywan, admirateur des Frères Dardenne et de Mickael Haneke, voulait une approche très éloignée de ce que l'on peut trouver le plus souvent dans le cinéma indien de Bollywood. Le metteur en scène explique : "Les gens sont de plus en plus attirés par des films qui abordent de vrais sujets et qui s’appuient sur de bons scénarios – ils commencent à se lasser des chants et des danses ! Du coup, on ne voulait aucune scène de chant ou de danse dans notre film. Je crois vraiment qu’un film est fait pour émouvoir et présenter des situations réalistes." Il souhaitait aller à l'encontre des chemins tracés qu'empruntent de nombreux films quand ils abordent la perte d'un être cher, en y filmant que la tristesse et la souffrance. Selon lui, toute cette douleur peut également faire naître en nous une profonde sagesse : "La souffrance est source d’enseignements, et elle rend le plus souvent beaucoup plus sage. Pour moi, le film est un récit initiatique, dans lequel la douleur peut s’avérer positive et n’est pas forcément synonyme de détresse absolue. D’ailleurs, Bénarès est connue comme la « ville de la mort », et on raconte que si l’on meurt à Bénarès, on trouvera le salut. C’est pourquoi c’était d’autant plus important d’y situer l’intrigue."
"Massan" est un magnifique long-métrage sur une jeunesse indienne muselée par des traditions ancestrales... Impossible de résister aux mélodies de Bruno Coulais, aux couleurs flamboyantes d'Ayinash Arun Dhaware, aux beaux visages de Deepak et Devi, aux flux éternels de ce fleuve mythique et mystique.
Mais le film n'est pas que "contemplatif", et il aborde des sujets politiques, sociaux et sociétaux de première importance : la condition des femmes, la stupidité du système de castes, les enfants condamnés à travailler, le poids des tradition, la corruption
Avec bienveillance envers ses personnages, tous vraisemblables et défendus par des acteurs touchants, ce film aspire à la profondeur avec un récit semé de rebondissements, déployé avec fluidité, à la fois contemporain et mû par un certain lyrisme.
C’est l’un des attraits de "Masaan" : sa capa­cité à surprendre. L’amour surgit d’une suite d’ac­ci­dents de la vie. D’une grande poésie. Je suis sorti de ce très beau film avec la sensation d'avoir été guidé au coeur d'un pays, de ses bouleversements et de ses paradoxes, par un hôte lucide et cependant plein d'espoir.

MASAAN DE NEERA GHAYNAN PAR CRITIQUE  CHONCHON

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