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dimanche 19 juillet 2015

DIFRET DE ZERESENAY MEHARI par Critique Chonchon

"Difret"
(En français : "courage" aussi bien que "viol")
À trois heures de route d’Addis Abeba, Hirut, 14 ans, est kidnappée sur le chemin de l’école : une tradition ancestrale veut que les hommes enlèvent celles qu’ils veulent épouser. Mais Hirut réussit à s’échapper en tuant son agresseur. Accusée de meurtre, elle est défendue par une jeune avocate, pionnière du droit des femmes en Ethiopie, qui deviendra pour son action, Prix Nobel de la Paix en Afrique.
Hollywood peut proposer le pire, mais aussi le meilleur. Car ici, sans l'engagement politique personnel d'Angelina Jolie, le film ne serait pas. Des liens particuliers l'unissent à l'Éthiopie, pays où elle a adopté sa fille Zahara en 2005, (puis y est retournée en 2007 avec 2 millions $ pour lutter contre le sida et la tuberculose), et ses relations, tant avec l'ONU et de multiples ONG, qu'avec évidemment Hollywood, ont permis que le film puisse faire.
La force du film est de ne pas juger à proprement parler, mais bien de rappeler que certaines coutumes ancestrales ne sont pas en concordance avec ce que doivent être les droits humains, notamment ceux des femmes, et préalablement ceux des adolescentes et des fillettes.
Là où Zeresenay Mehari propose un film passionnant, c'est qu'il ne se contente pas de raconter une "histoire vraie", mais de nous montrer et les combats personnels, et le combat judiciaire. Fondé certes sur des faits réels, le récit transcende le militantisme de son sujet par l'intelligence de son scénario.
Par ailleurs, le film s'inscrit dans une période où un renouveau féministe tient une belle place sur les écrans : "Mad Max", "Masaan", "Une seconde Mère", "Mustang", "La Belle Promise"... films venus de tous horizons, parfois ceux qu'on n'attend pas, et c'est salutaire.
Pour en revenir au film, je reconnais volontiers qu'il est de forme classique, mais c'est volontaire, car il assume son but pédagogique. On est néanmoins touché par les paysages, notamment celui de la mère de Hirut qui semble être la mère de toute l'humanité, par les paysages sublimes affrontant la pauvreté la plus offensante.
Il faut noter que le gouvernement d'Éthiopie a autoriser tous les documents juridiques dont l'équipe de tournage avait besoin pour écrire cette histoire en collant au plus près de la réalité historique.
Oui, on aime que le cinéma puisse contribuer à des avancées sociales, sociétales et juridiques d'importance majeur, mais on aime aussi qu'il nous raconte le processus de celles que nous ne connaissons pas.
J'espère sincèrement que nous reverrons l'actrice éthiopienne Meron Getnet (dans le rôle de Meaza Ashenafi, ancienne juge devenue l'avocate de nombreuses femmes battues, jeunes femmes violées, dont Hirut) qui est aussi bonne actrice qu'elle est ravissante.
Le réalisateur filme utile, mais sans complaisance ni triomphalisme, respectant (grâce à l’ellipse) la dignité de ses personnages, sobrement incarnés. "Difret", à juste titre, peut s’enorgueillir d’avoir été primé à Sundance, à Berlin et à Valenciennes.

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